Je n'ai jamais été publiée, mais en revanche, j'ai en mémoire un témoignage très intéressant de l'auteur de Tara Duncan, dont le nombre de livres vendus dépasse le million
. Elle est française et connait donc très bien notre système.
Elle a écrit ce post en réponse à ses nombreux fan, jeunes pour la plupart, qui voulaient se faire éditer et qui ne connaissaient pas grand chose au monde de l'édition.
Voici le texte ( si vous voulez le lire sur le site, voici l'adresse : http://www.taraduncan.com/blog/archives/date/2010/04, le texte est en bas de la page)
les mystères insondables du monde de l’édition, où comment décrypter les éditeurs…et éviter les pièges des faux éditeurs.
Dans Maaaa vie — Par Sophie Audouin-Mamikonian le Dimanche 11 avril 2010 @ 12:06
En général, les taraddicts sont de grands lecteurs. Et les grands
auteurs sont toujours de grands lecteurs. Donc, les taraddicts écrivent
vraiment beaucoup et je reçois, tous les jours, des dizaines de
« premier chapitre ».
Avec ce premier chapitre, il y a toujours la phrase « je voudrais me
faire éditer ». Mais la grande majorité d’entre vous ne sait pas du tout
comment faire et vous pouvez aussi, être la proie de soit disant
sociétés d’éditions, en réalité des imprimeurs déguisés, qui vous font
payer des fortunes pour soit disant vous éditer. Combien de fois ais-je
reçu des mails enthousiastes des taraddicts qui me disaient : Ayé ayé,
je vais être édité, mais c’est cher, ça va couter 1000, 2000, 3000 euros
à mes parents…
Comme ça commence sérieusement à me gonfler que mes taraddicts se
fassent avoir, je vais donc vous donner quelques règles très simples :
1) Un éditeur est un acheteur. Rien de plus, rien de moins. Il va
vous payer pour avoir le droit d’éditer votre livre. Mon premier livre,
par exemple m’a été payé 3100 euros. J’avais en plus, un pourcentage sur
chaque livre vendu qui allait de 10% du prix hors taxes jusqu’à 10 000
exemplaires vendus, 12 % au dessus de 20 000, 14% à partir de 50 000
exemplaires vendus.
L’éditeur se rembourse de l’avance, c’est à dire qu’il ne commence à
vous payer la seconde partie, c’est à dire les pourcentages sur livre
vendu, qu’à partir du moment où la somme de 3100 euros, la fameuse
« avance », est remboursée par les ventes de livre. Donc, quoi qu’il
arrive, sauf aux éditions Plon qui ont exigé le remboursement de mon
avance lorsqu’ils ont décidé de ne pas me publier après m’avoir signé
mon contrat (ce qui est minable et se pratique très peu dans le milieu),
vous garderez cet argent, même si votre livre ne se vend pas du tout.
2) Quel est le travail de l’éditeur ?
A) Il travaille votre livre avec vous. Vous signale vos erreurs, ce
qui va et ne va pas. Soyons clairs, les éditeurs sont des êtres humains
comme les autres, il y en a des bons et des mauvais. Mais en général,
ils sont plutôt de bon conseil.
B) Ensuite, l’éditeur va faire travailler les graphistes afin que
vous ayez la couverture la plus efficace possible. Il y a des outils
marketing pour cela. Les éditeurs qui pincent le nez en disant qu’ils ne
font pas de livres commerciaux utilisent exactement les mêmes outils,
c’est toute l’ironie de ce curieux métier. C’est là où les éditeurs sont
crucifiés. Ils disent faire un métier très noble, intellectuel et tout
et tout, sauf que ce métier doit payer leur steak de tous les jours.
Donc pas le choix, ils doivent vendre…
C) L’autre grand atout de l’éditeur, c’est qu’il dispose d’un circuit
de distribution. C’est à dire que ses commerciaux vont aller voir les
librairies, les supermarchés etc afin qu’ils prennent votre livre. En
fonction du nombre de livres qui sont mis en place, vous avez une plus
ou moins grosse exposition. Par exemple aujourd’hui, Tara est mise en
place à 50 000 exemplaires. Pour mon premier livre, Seuil l’avait mis en
place à 8 000 exemplaires.
D) Ensuite, pour en faire la promotion, l’éditeur fait intervenir une
attachée de presse. Là aussi, il y a de bonnes attachées de presse et
des mauvaises. C’est un métier passionnant, mais terrible. Les
journalistes sont de plus en plus submergés par des centaines de livres à
lire ou à défendre et selon le talent de l’attachée de presse, le vôtre
peu parfaitement passer à la trappe. C’est ce qui est arrivé à mon amie
Martine Mairal, avec son excellent polar « Lorsque la lune sera bleue »
qui n’a eu quasiment aucun papier. Elle a clairement eu un mauvais
attaché de presse, ou pire, un attaché de presse qui avait d’autres
livres plus « importants » à défendre. Comme des livres « people » qui
sont faciles à placer auprès des journalistes, surtout de télévision.
En revanche, lorsqu’on en a une bonne, comme celle de chez XO, c’est
total bonheur. Attention, cela ne veut pas forcément dire que les
articles seront élogieux hein, mais au moins, les journalistes en
parleront et c’est ce qui est important…
E) Enfin, ce qui est loin d’être négligeable, il y a aussi tous les
services annexes : Déclinaison de votre livre au cinéma ou à la télé,
vente de votre livre aux éditeurs étrangers. Chaque année, il y a ce
qu’on appelle des « book fairs » dans le monde entier, où les éditeurs
envoient leurs services de droits étrangers montrer votre livre et
essayer de le vendre. C’est comme ça que Seuil a vendu mon livre dans 12
pays. Chaque pays paye une somme forfaitaire et un pourcentage sur les
ventes, cet argent est partagé à 50/50 avec l’éditeur. Enfin, il y a la
négociation des droits avec les livres de poches, qui sont d’autres
maisons d’éditions spécialisées. Là aussi, l’argent est partagé en deux.
Tout ceci, un imprimeur est incapable de le faire, bien évidemment.
Alors, ces soit-disant maisons d’édition qui vous annoncent qu’ils vont
vous publier si vous les payez sont ce qu’on appelle des maisons à
compte d’auteur. C’est en fait, comme si vous vous publiez vous-même. Et
là, bien évidemment, ils acceptent tous les textes, même les plus
mauvais, puisqu’ils veulent juste faire du chiffre d’affaire. Donc en
aucun cas cela ne démontre de la qualité de votre texte.
Pour terminer, beaucoup d’entre vous me demandent comment faire pour
se faire éditer, si on ne risque pas de leur « piquer » leur texte et si
à 12, 14, 18 ans, ils ont une chance de se faire publier. Voici donc ma
réponse
1) Je ne vois pas bien pourquoi vous mettriez votre âge sur votre lettre
d’accompagnement. L’éditeur se fout totalement que vous ayez 1 an ou
102 ans, seul le talent compte
2) Une lettre courte du type « Voici xxxxx, mon roman de
fantasy/polar/thriller/histoire d’amour, j’espère que vous aurez autant
de plaisir à le lire que j’ai eu de plaisir à l’écrire, bien à vous » et
votre signature. Les longues proses expliquant le pourquoi du comment,
ils ne le lisent pas.
3) Ne mettez ni dessin ni carte, ni machins décoratifs. Ils s’en fichent
et de toutes les façons le graphisme ne dépendra pas de vous, alors
inutile de vous fatiguer. Ne mettez pas non plus de remerciements sur la
page de garde, ça fait prétentieux, vous le ferez lorsque vous serez
sûrs d’être édités.
4) Votre tapuscrit doit être écrit en corps de police 12, avec un
interligne et demi entre chaque ligne. C’est plus facile à lire pour
l’éditeur. Aucun éditeur n’accepte de fichiers mails, tout simplement
parce que cela leur ferait trop cher à imprimer et qu’il est impossible
de travailler sur un texte sur un ordinateur. Il doit impérativement
être imprimé.
5) Sur la page de garde, remettez votre nom, votre adresse, votre tel et
votre adresse mail, les éditeurs perdent souvent les pages
d’accompagnement.
6) Envoyez votre tapuscrit A TOUS LES EDITEURS ! C’est tellement
difficile de se faire éditer que « choisir » est complétement débile. Le
bon éditeur sera celui qui vous choisira et vous achetera. Point.
7) Personne ne vous piquera votre texte. Les éditeurs reçoivent en moyen
5000 manuscrits par éditeur et par an. Sachant qu’il y a rarement plus
de 4 éditeurs par maison d’édition, ils n’ont aucune raison de vous
voler votre texte, il est plus simple de vous publier…
Enfin, les éditeurs ont rarement le temps de lire votre livre en
entier. Si les premières pages ne sont pas bonnes, ils ont tellement de
manuscrits à lire qu’ils mettent à la poubelle tout de suite. Donc la
règle numéro 1, c’est qu’il faut que les premières pages soient
ébloulissantes et les dernières aussi…ainsi, votre tapuscrit aura une
bonne chance d’aller en comité de lecture et peut être d’être choisi !
9) Enfin, faites corriger autant que possible vos fautes avant d’envoyer
votre travail. C’est une simple question de courtoisie pour le travail
de l’éditeur. Un livre truffé de fautes au point d’être illisible sera
vite rejeté.
Ben voilà, je vous ai dévoilé quelques unes des règles d’or de ce métier. A présent, bon courage !
HACA fans de Tara !